Adieux à Biyouna : une foule nombreuse accompagne l’icône algérienne jusqu’à sa dernière demeure et découvre une surprise sur le lieu de sépulture.

Adieux à Biyouna : une foule nombreuse accompagne l’icône algérienne jusqu’à sa dernière demeure et découvre une surprise sur le lieu de sépulture.

Alger, Algérie – Ce n’était pas une scène de cinéma, et pourtant, l’émotion qui flottait ce matin-là au-dessus du cimetière dépassait tout ce que la fiction aurait pu écrire. Sous un ciel lourd, rythmé par les chants sacrés “Allahu Akbar, Allahu Akbar” qui s’élevaient d’une foule compacte et recueillie, l’Algérie a dit adieu à l’une de ses filles les plus chéries. Biyouna, la voix rauque du peuple, la “louve” au cœur tendre, a rejoint sa dernière demeure, laissant derrière elle un vide abyssal que ni les pleurs ni les hommages ne sauront combler.

L’atmosphère était électrique, chargée de cette tristesse collective qui saisit une nation lorsqu’elle perd un repère. Des centaines d’anonymes se sont mêlés aux figures du monde artistique, formant un cortège immense, une vague humaine venue saluer celle qui, pendant des décennies, a fait rire et pleurer les foyers, de Bab El Oued jusqu’aux banlieues parisiennes.

“J’ai eu la chance de croiser sa route” : L’Hommage de Djaffar Gacem

Au milieu de cette foule, les visages fermés des compagnons de route de l’artiste en disaient long sur la perte subie. Djaffar Gacem, le réalisateur qui a su capturer l’essence comique de Biyouna dans la série culte Nass Mlah City, a livré un témoignage vibrant, la voix étranglée par l’émotion.

“J’ai eu la chance, dans mon parcours professionnel, que ma carrière croise celle de cette grande dame”, confie-t-il, le regard perdu vers l’horizon, comme pour chercher une dernière fois celle qui fut sa muse. Pour lui, comme pour des millions d’Algériens, les souvenirs se bousculent. Nass Mlah City 1, 2, 3… autant de chapitres d’une histoire d’amour télévisuelle entre une actrice et son public.

“C’était puissant. Elle a tout donné à l’art. Elle a consacré sa vie entière à ça”, insiste-t-il. Ses mots résonnent comme une sentence définitive : “Je ne pense pas qu’on trouvera une autre Biyouna. En tout cas, pas dans les années à venir.” Il rappelle avec justesse que Biyouna n’était pas qu’une humoriste ; elle avait prouvé sa valeur dans le drame, au théâtre, au cinéma. Une artiste totale, irremplaçable.

Le Cri de Colère : “Honorons-les vivants !”

Mais au-delà de l’éloge funèbre, c’est un cri de colère, un regret amer qui a jailli près de la tombe encore fraîche. Alors que les caméras se pressaient pour capturer la douleur des célébrités, une vérité crue a été lancée : “Pourquoi attendre qu’ils meurent pour les honorer ?”

Le réalisateur, visiblement touché par la disparition de son amie, a pointé du doigt une triste réalité du monde culturel. “Je voudrais qu’on honore nos artistes de leur vivant. On a une panoplie d’artistes, Dieu merci, encore en vie. Donnons-leur de la considération maintenant ! Pas besoin d’attendre que la mort arrive pour voir toutes les caméras braquées sur eux.”

Ce message, lancé au milieu du deuil, sonne comme un appel à la conscience collective. Il rappelle que la reconnaissance ne doit pas être un bouquet de fleurs déposé sur une pierre tombale, mais un soutien constant, une valorisation au quotidien de ceux qui forgent l’identité culturelle du pays. “L’artiste doit avoir son droit à la vie avant son droit à la mort”, a-t-il conclu, avant de présenter ses condoléances à la “petite et la grande famille” de la défunte.

Une aura qui dépassait les frontières

Un autre compagnon de scène, ayant partagé l’affiche avec elle dans la série Millionaire (une coproduction algéro-tunisienne), a tenu à rappeler la dimension internationale de Biyouna. “Elle a sorti Biyouna du cadre purement algérien”, explique-t-il. Grâce à son talent brut et à sa “touche” unique, elle avait conquis le monde arabe et l’Europe.

Mais c’est la femme, plus que la star, dont il se souvient aujourd’hui. “J’ai connu l’humain de près. La bonté, la spontanéité, la générosité”, raconte-t-il avec émotion. “Elle distribuait de l’énergie et de la joie partout où elle passait.” C’est cette image que l’on gardera d’elle : une force de la nature, incapable de tricher, qui marquait au fer rouge tous ceux qui avaient le privilège de travailler à ses côtés.

Le dernier rideau

Alors que la foule se dispersait lentement, laissant Biyouna seule face à l’éternité, une certitude demeurait. Comme l’a si bien dit son collègue : “C’est la loi de la vie, le destin de Dieu.” Mais si les corps partent, les œuvres restent. Biyouna laisse derrière elle des décennies de rires, de répliques cultes et de chansons qui continueront de vivre dans la mémoire collective.

Aujourd’hui, l’Algérie pleure. Mais demain, elle se souviendra. Elle se souviendra qu’une femme, partie de rien, a su devenir tout, simplement en restant elle-même. Adieu l’artiste, et merci pour tout.

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