Disparu en 1963, Retrouvé en 1995 : Le Chapeau de Paille de Gaston Villeneuve Révèle un Scandale d’État Radioactif

C’était une matinée d’automne comme le Limousin en a le secret, baignée d’une lumière dorée qui fait rougeoyer les châtaigniers. Ce 14 octobre 1963, Gaston Villeneuve, 59 ans, a ajusté son chapeau de paille tressé — celui-là même acheté à la foire de Limoges — et a embrassé sa femme Marie. Il partait inspecter ses 43 hectares de terres, comme il le faisait chaque jour depuis trente ans. Il n’est jamais revenu.
Pendant trois décennies, sa disparition est restée une plaie ouverte au cœur de la France rurale. Gaston, l’homme de la ponctualité, le père aimant, s’était-il enfui ? Avait-il eu un accident ? Sa femme Marie a scruté l’horizon chaque matin, refusant de croire à l’abandon. Elle est morte sans savoir que la réponse gisait là, à quelques mètres sous ses pieds, dans la terre même que son mari chérissait tant.
32 Ans de Silence et une Découverte Hasardeuse
Le destin a finalement frappé à la porte en mai 1995, non pas sous la forme d’un gendarme, mais sous les chenilles d’une pelleteuse. Le maire de Saint-Léonard-de-Noblat avait lancé un projet immobilier, “Les Collines Vertes”, sur les anciennes terres des Villeneuve.
Les ouvriers, habitués à remuer la boue, ont vite compris que ce chantier n’était pas ordinaire. La terre était noire, huileuse, et dégageait une odeur acre qui prenait à la gorge. Puis, le godet de la pelle a heurté du béton. En creusant, ils ont mis au jour une cavité secrète, une sorte de capsule temporelle artisanale.
À l’intérieur, protégé par des planches et du plastique, reposait un objet qui a fait frissonner le chef de chantier : un chapeau de paille, intact. Et dessous, une sacoche en cuir remplie de documents et un vieil appareil photo Kodak. Gaston n’avait pas fui. Il avait laissé un message.
Le Secret des Terres Empoisonnées
Les documents retrouvés étaient accablants. Gaston Villeneuve n’était pas seulement un fermier ; il était devenu, malgré lui, un espion sur ses propres terres. Ses notes détaillaient un ballet nocturne terrifiant : des camions militaires, des hommes en combinaison, et des fûts marqués du sceau du danger, enterrés en catimini au clair de lune.
En plein boom du nucléaire français des années 60, les autorités cherchaient désespérément des lieux discrets pour se débarrasser de déchets radioactifs encombrants. Les terres isolées et granitiques de Gaston avaient été choisies pour devenir une poubelle nucléaire clandestine.
Gaston avait tout vu. Il avait tout noté. Il avait photographié les camions, les visages, les plaques d’immatriculation. Une photo, particulièrement glaçante, prise au téléobjectif, montrait un responsable de l’opération regardant directement vers l’objectif. Gaston avait été repéré.
“Opération Silence” : L’Assassinat d’un Innocent
La réouverture de l’enquête en 1995, appuyée par ces preuves d’outre-tombe, a transformé le mystère en scandale d’État. Les archives des services secrets, partiellement déclassifiées, ont révélé l’existence de l'”Opération Silence”. Gaston Villeneuve, désigné sous le nom de code “Témoin VG47”, était considéré comme une menace pour la sécurité nationale.
Le matin de sa disparition, il ne se rendait pas seulement aux champs. Il avait prévu de se rendre à la préfecture pour dénoncer l’empoisonnement de sa région. Il n’en a jamais eu l’occasion. Intercepté par des agents de l’État, il a été exécuté froidement. Pour effacer toute trace, son corps a été dissous dans de l’acide, une méthode barbare digne des pires régimes totalitaires.
Ses assassins avaient cependant commis une erreur psychologique majeure : ils avaient enterré ses effets personnels et ses preuves sur place, peut-être par arrogance, pensant que la radioactivité du site dissuaderait quiconque de creuser un jour.

Une Justice Tardive pour un Héros Oublié
Le procès qui s’est tenu à la fin des années 90 a été historique. Pour la première fois, l’État français a été mis face à ses crimes : homicide et mise en danger de la vie d’autrui. Les expertises ont confirmé que la zone était une bombe à retardement radiologique, responsable d’une vague inexpliquée de cancers dans la région au fil des décennies. Marie, qui avait bu l’eau du puits et mangé les légumes du jardin toute sa vie, portait elle aussi les stigmates de cette irradiation dans sa chair.
Le verdict a condamné l’État à verser des millions en réparations et à dépolluer intégralement le site — une tâche titanesque qui a nécessité l’évacuation de 200 tonnes de terre contaminée.
Gaston Villeneuve a été réhabilité non plus comme un disparu, mais comme un lanceur d’alerte héroïque. Un homme simple qui a refusé de fermer les yeux, payant de sa vie son attachement à la vérité et à sa terre. Aujourd’hui, son chapeau de paille est exposé au musée, symbole muet mais puissant qu’aucun secret, aussi profondément enterré soit-il, ne peut résister indéfiniment à la lumière.