La mort de Bébert des Forbans : la cause du décès révélée et un adieu à une légende du rock ‘n’ roll

C’est une nouvelle qui a l’effet d’un coup de tonnerre dans le ciel gris de ce mois de novembre. Une voix s’est tue, mais pas n’importe laquelle. Celle qui, depuis plus de quarante ans, nous invitait à laisser nos soucis au vestiaire pour simplement “chanter, danser et mettre nos baskets chouettes”. Albert Kassabi, dit Bébert, l’emblématique leader des Forbans, s’est éteint à l’âge de 63 ans, emportant avec lui une inépuisable réserve d’énergie positive et un pan monumental de la culture populaire française.
La France se réveille avec la gueule de bois des lendemains de fête qui tournent mal. Ce mardi 25 novembre 2025 restera gravé comme le jour où le rock’n’roll à la française a perdu l’un de ses plus fidèles serviteurs. C’est Michel Papin, son complice de toujours, le batteur avec qui il a fondé ce groupe de légende sur les bancs du lycée, qui a eu la lourde tâche d’annoncer l’impensable. La voix brisée, chargée d’un chagrin que les mots peinent à traduire, il a confirmé ce que personne ne voulait croire : Bébert est parti. Il a tiré sa révérence non pas sous les projecteurs qu’il aimait tant, mais dans l’intimité de la région parisienne, après un combat mené avec une dignité exemplaire contre la maladie.

Le combat silencieux d’un guerrier du bonheur
Si sur scène, Bébert était une pile électrique, un tourbillon de bonne humeur capable de réveiller les foules les plus apathiques, en coulisses, il livrait une tout autre bataille. Une bataille discrète, pudique, loin du voyeurisme médiatique. La maladie, il l’a affrontée comme il montait sur scène : avec courage, sans jamais se plaindre, refusant qu’elle ne définisse qui il était.
Ses proches racontent aujourd’hui un homme qui voulait protéger son public. Pour Bébert, les Forbans, c’était la joie, la fête, l’insouciance. Il était hors de question de ternir cette image lumineuse avec la noirceur de la souffrance. Jusqu’au bout, il a continué à travailler, à projeter, à rêver. On parle de mélodies griffonnées sur des carnets au milieu de la nuit, de rythmes tapotés machinalement sur un accoudoir alors même que les forces l’abandonnaient. “On aurait dit qu’il entendait toujours un orchestre imaginaire”, confie un ami musicien. La musique n’était pas son métier, c’était sa respiration, sa seconde peau, son armure contre l’adversité.
“Chante” : Plus qu’un tube, un hymne générationnel
Impossible d’évoquer Bébert sans que ne résonnent immédiatement les premières notes de cuivres synthétiques de “Chante”. En 1982, ce titre a déferlé sur la France comme un raz-de-marée. Deux millions d’exemplaires vendus. Des discothèques de campagne aux grands plateaux télé parisiens, tout le monde a fredonné ce refrain. Mais résumer Bébert à ce seul succès serait une injustice.
Les Forbans, c’était une machine de guerre scénique. Avec plus de 50 concerts par an à leur apogée, ils ont sillonné la France entière, transformant chaque salle des fêtes en temple du rockabilly. Bébert ne chantait pas pour son public, il chantait avec lui. Il détestait d’ailleurs le mot “fan”, qu’il jugeait trop distant, préférant parler d'”amis” ou de “compagnons de route”. Cette proximité n’était pas feinte. C’était celle d’un homme qui restait des heures après les concerts pour signer des autographes, serrer des mains, écouter les histoires de ceux qui l’écoutaient. Il savait que sans eux, “une chanson n’est qu’une chanson qui dort”.
Leur retour triomphal lors de la tournée “Âge Tendre” et leur concert mythique à l’Olympia en 2018 pour fêter leurs 40 ans de carrière ont prouvé que le lien était indéfectible. Ce soir-là, dans cette salle sacrée, Bébert n’était pas seulement une star des années 80 ; il était le gardien d’une flamme, celle d’une époque où la musique se vivait sans cynisme, avec une générosité brute.

Une vie sentimentale faite de respect et de renaissance
Derrière le showman se cachait un homme d’une grande sensibilité, dont la vie personnelle a été marquée par des tournants décisifs. Père de deux enfants, Kevin et Georgia, nés de son union avec Nourith, Bébert a traversé l’épreuve du divorce à 54 ans. Mais là encore, l’homme a fait preuve d’une classe rare. “Nous avons divorcé comme beaucoup de gens, mais nous nous entendons très bien”, disait-il, balayant tout pathos. Il a toujours mis un point d’honneur à préserver l’harmonie familiale, restant un père attentif et aimant, encourageant ses enfants dans leurs passions.
Puis, la vie lui a offert ce que l’on n’attend parfois plus : une seconde chance, fulgurante et magnifique. Sa rencontre avec Astrid, une danseuse talentueuse et cultivée de vingt ans sa cadette, a été un coup de foudre, une évidence. Il parlait d’elle avec des étoiles dans les yeux, admirant sa beauté bien sûr, mais surtout son intelligence, sa douceur et sa culture.
Leur mariage, célébré le 15 septembre 2022 à Mennecy devant 130 invités, fut l’apogée de ce bonheur retrouvé. Astrid n’a pas seulement épousé l’homme, elle a épousé son univers, s’intégrant parfaitement à sa famille recomposée. Elle était son pilier, son équilibre. Dans la maladie, elle a été son roc, celle qui prenait des notes en répétition, celle qui apaisait ses angoisses, celle qui, par sa simple présence, lui donnait la force de continuer à sourire. Leur complicité, visible sur scène comme à la ville, était de celles qui font croire que l’amour véritable existe encore.
L’héritage d’un passeur d’émotions
Aujourd’hui, alors que les hommages pleuvent sur les réseaux sociaux, une autre facette de Bébert émerge : celle du mentor. Loin de jouer les vedettes inaccessibles, il passait un temps fou à conseiller les jeunes artistes. Il leur apprenait à gérer le trac, à poser leur voix, mais surtout à rester humbles. “Le rock’n’roll, c’est une façon d’aimer la vie”, répétait-il comme un mantra. Il aimait la transmission, le partage, convaincu que la musique était le plus beau des ponts entre les générations.
Sa maison, transformée avec Astrid en un cocon chaleureux rempli de souvenirs – affiches vintage, costumes de scène, instruments – était le reflet de son âme : nostalgique mais vivante. Il aimait raconter la “petite histoire derrière la grande”, les galères de bus, les fous rires à 2 heures du matin sur une nationale déserte. C’était ça, la vie de Bébert : une aventure humaine avant d’être une carrière commerciale.
La mort de Bébert des Forbans laisse un vide immense. Pour beaucoup, c’est une part d’enfance qui s’effondre, le souvenir des boums du samedi soir, des premiers baisers maladroits sur un slow, ou de l’euphorie collective d’un mariage où tout le monde se lève dès les premières notes de “Chante”.
Il est parti, mais il nous laisse une consigne simple, presque un ordre joyeux : ne jamais cesser de danser. Alors, pour lui rendre l’hommage qu’il mérite, ne pleurons pas en silence. Montons le son, enfilons nos baskets, et chantons. Chantons pour Bébert, pour Astrid, pour les Forbans. Car tant qu’il y aura quelqu’un pour reprendre ce refrain, la légende, elle, ne s’éteindra jamais. Salut l’artiste, et merci pour la fête.