Exécution de l’homme le plus riche de France, qui a trahi son pays pour de l’or nazi.

À l’été 1940, alors que les bottes des soldats de la Wehrmacht claquaient sur les pavés parisiens et que la France s’effondrait dans le chaos, un homme voyait dans cette débâcle non pas une tragédie, mais une opportunité en or. Paris, ville lumière, s’était transformée en un marché sombre où la cupidité régnait en maître. Au cœur de ce système gangrené par la trahison émergea une figure aussi énigmatique que scandaleuse : Mandel Skolnikov.

L’Opportuniste venu de l’Est

Né en 1895 dans une petite ville de l’actuelle Biélorussie, Skolnikov n’était pas destiné à devenir le roi du marché noir parisien. Issu d’une famille de marchands, il a fui la Révolution bolchevique pour errer à travers l’Europe, de la Pologne à la Belgique, traînant derrière lui des faillites et des condamnations pour escroquerie. Lorsqu’il s’installe en France dans les années 1930, il change son prénom en “Michel” pour masquer ses origines juives et fonde une modeste entreprise de textile.

Mais Skolnikov n’a jamais eu l’intention de rester modeste. Malgré les ordres d’expulsion et la surveillance policière, il prospère. Lorsque la guerre éclate et que l’Occupation commence, la plupart des Français sombrent dans la peur et la privation. Skolnikov, lui, ouvre grand les portes de ses entrepôts à l’occupant.

Le Pacte avec le Diable

Ce qui rend l’histoire de Skolnikov particulièrement troublante, c’est l’ironie macabre de sa situation. Homme d’origine juive – peut-être Karaïte, une secte parfois exemptée des lois raciales antisémites – il devient l’un des rouages essentiels de la machine de guerre nazie. Il commence par fournir la Kriegsmarine (la marine allemande), vendant tout, du textile aux produits de luxe, à des prix exorbitants.

C’est dans ce cercle qu’il rencontre Hélène Alfreda Sanson, une Allemande travaillant pour les approvisionnements navals. Elle devient sa maîtresse et sa clé d’entrée vers les plus hautes sphères du pouvoir nazi. Grâce à elle, Skolnikov tisse des liens étroits avec la SS, notamment avec Fritz Engelke, un proche d’Heinrich Himmler.

Sous la protection directe des SS, Skolnikov devient intouchable. Il pille littéralement l’économie française, rachetant à bas prix des marchandises destinées à être confisquées pour les revendre à prix d’or à ses protecteurs allemands. À l’apogée de ses activités, il gagne entre 1 et 2 millions de francs par mois, amassant une fortune estimée à 2 milliards de francs (environ 590 millions de dollars actuels).

L’Empire Immobilier et la Vie de Château

L’argent coule à flots, et Skolnikov doit le blanchir. Il se tourne alors vers la pierre, construisant un empire immobilier sans précédent. Il acquiert des hôtels de légende : le Plaza à Nice, le Grand Hôtel à Antibes, et plusieurs établissements prestigieux à Paris. À Monaco, il devient le plus grand propriétaire foncier de la principauté, possédant des hôtels comme le Louvre et le Windsor, au point que le gouvernement monégasque doit changer la loi pour freiner son appétit insatiable.

Pendant que les Parisiens affamés font la queue pour des tickets de rationnement, “Monsieur Michel” mène grand train. Il réside près de l’Arc de Triomphe avec un personnel de maison complet, organise des dîers fastueux où se croisent officiers allemands et collaborateurs, et couvre sa maîtresse de bijoux inestimables. La rumeur court même qu’Himmler en personne aurait dîné à sa table.

La Fuite et la Fin Mystérieuse

Mais en 1944, le vent tourne. Les Alliés débarquent, et l’étau se resserre. Skolnikov, sentant la fin proche, commence à transférer sa fortune vers l’Espagne franquiste. Il s’y réfugie juste avant la Libération, espérant jouir de ses richesses mal acquises à l’abri des représailles. Cependant, la France libre n’a pas oublié.

Le 10 juin 1945, sa cavale prend fin brutalement. Des agents des services secrets français, déterminés à récupérer le trésor de guerre ou peut-être à se servir eux-mêmes, lui tendent un piège près de Madrid. Attiré sous prétexte d’une transaction de bijoux, Skolnikov est enlevé.

La suite de l’histoire reste floue et brutale. Selon la version officielle, il aurait été drogué pour être transporté clandestinement vers la France dans le coffre d’une voiture, mais serait mort d’une overdose de sédatifs en route. Une autre version suggère qu’il a été battu à mort après avoir résisté. Quoi qu’il en soit, ses ravisseurs, paniqués, se débarrassent de son corps sous un pont et y mettent le feu.

Ainsi s’achève la vie de l’homme qui avait parié contre son propre pays et sa propre identité pour le pouvoir et l’argent. La saisie de ses biens reste à ce jour la plus importante de l’histoire judiciaire française, un dernier record pour celui qui voulut tout posséder, mais finit par tout perdre, y compris sa sépulture.

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