Scandale à l’ONU : Le Mali Accuse Trois États de ‘Guerre Hybride’ et de Soutien au Terrorisme International

Le Premier Ministre malien Abdoulaye Maïga a transformé la tribune de la 80e session de l’Assemblée générale des Nations Unies en une véritable estrade d’accusation, livrant un discours d’une audace et d’une virulence sans précédent. S’exprimant au nom de la Confédération des États du Sahel (AES), qui regroupe le Mali, le Burkina Faso et le Niger, il a mis en lumière ce qu’il a qualifié de « guerre hybride » et a pointé du doigt des puissances internationales et régionales, les accusant directement de soutenir le terrorisme et de chercher à saper la souveraineté retrouvée des nations sahéliennes. Loin des usages diplomatiques feutrés, l’allocution a retenti comme un défi retentissant lancé au multilatéralisme actuel, exigeant une réforme immédiate et une prise de conscience mondiale face à l’injustice.
Le Front Panafricaniste de l’AES contre l’Impérialisme
Dès les premières minutes de son intervention, le Premier Ministre Maïga a donné le ton, adressant les salutations des pères fondateurs de l’AES : le Général Assimi Goïta (Mali), le Capitaine Ibrahim Traoré (Burkina Faso) et le Général Abdourahamane Tiani (Niger). L’essence de son message était claire : les peuples de l’AES sont « plus que jamais déterminés à se libérer du joug de l’impérialisme et à réaliser leur autodétermination dans un esprit panafricaniste ».
L’AES se positionne comme l’avant-garde de la lutte contre le terrorisme, qu’elle perçoit comme une menace existentielle soutenue par des forces extérieures. Faisant fi des pronostics de ceux qui prédisaient l’effondrement sécuritaire après le retrait des forces internationales, les nations confédérées ont fait preuve d’une « ingéniosité » basée sur la résilience et l’engagement patriotique de leurs peuples. Sous l’impulsion de leurs chefs d’État, une nouvelle dynamique de collaboration et de complémentarité a été établie entre les forces de défense et de sécurité des trois pays.
Cette approche souverainiste se traduit par un renforcement des capacités opérationnelles à travers « un recrutement massif, une formation adéquate et la fourniture d’équipement approprié », des efforts qui produisent « chaque jour des résultats encourageants sur le terrain ». Le Mali insiste sur le fait que, par son sacrifice, l’AES contribue de manière significative à la sécurité non seulement régionale, mais également mondiale, empêchant la propagation de la menace vers la côte ouest-africaine.
L’Accusation Tonitruante : La France et l’Ukraine en Cause
Le discours a pris une tournure particulièrement explosive lorsque le Premier Ministre a abordé la question des « sponsors étatiques étrangers ». Il a réitéré avec force la « ferme condamnation du soutien ouvert et parfois exprimé publiquement » de ces entités qui, « pour des motifs impérialistes », déstabilisent l’AES. Ce soutien se matérialise par la mise à disposition de conseillers, de moyens logistiques, d’armes, de munitions et l’octroi de « bases arrière » dans certains pays voisins, en violation flagrante du droit international.
C’est ici qu’Abdoulaye Maïga a établi une connexion directe et stupéfiante entre deux théâtres d’opérations géographiquement éloignés : la guerre en Ukraine et le terrorisme dans le Sahel. Il a rappelé l’attaque terroriste de juillet 2024 à Tinsawin, dans la région de Kidal, et a pointé du doigt l’attitude d’officiels ukrainiens qui auraient « publiquement revendiqué leur participation » à cet incident. Poursuivant cette ligne d’attaque, il a déclaré que le régime ukrainien est « devenu l’un des principaux fournisseurs de drones kamikazes aux groupes terroristes dans le monde ». L’appel est sans appel : les États occidentaux doivent cesser de fournir des armes à l’Ukraine, au risque de « contribuer à la promotion du terrorisme international ».
Quant au « régime français nostalgique de la colonisation », l’accusation est encore plus corrosive. Le Mali estime que l’appui de la France au régime ukrainien est une « manœuvre » visant à « occuper l’attention de la communauté internationale sur la guerre en Ukraine tout en sponsorisant les groupes terroristes évoluant dans le Sahel ». La preuve d’une « action de sabotage » française est étayée par le rappel d’une requête soumise au Conseil de Sécurité de l’ONU le 15 août 2022, demandant une réunion pour fournir des « preuves irréfragables du soutien de la France aux activités terroristes », requête restée « sans suite » jusqu’à présent. Le Mali appelle l’ONU à agir pour identifier les responsables de ces violences, concrétiser les résolutions et assurer que les ressources du Sahel profitent enfin à ses populations.
L’Algérie, Voisin Frère Devenu Cible au Tribunal International
Le Premier Ministre Maïga a également saisi cette tribune mondiale pour aborder la détérioration spectaculaire des relations entre le Mali et l’Algérie, un pays pourtant soutenu historiquement par Bamako dans sa guerre de libération. Il a vivement condamné la destruction d’un drone des forces armées maliennes le 1er avril 2025 par la « junte algérienne », annonçant avoir saisi la Cour Internationale de Justice (CIJ) à cet effet.
L’allocution a mis en exergue trois situations jugées « incongrues » et « incompréhensibles » :
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L’Attaque de Tawaten: Le Mali accuse la junte algérienne de n’avoir « rien vu ni entendu » concernant l’attaque perfide des forces maliennes à Tawaten, alors que l’acte terroriste aurait été « planifié sur son territoire ». Le Premier Ministre a qualifié cette passivité de troublante pour un pays désigné comme « champion de l’Union africaine de la lutte contre le terrorisme », mais qui serait devenu « champion de la promotion du terrorisme et exportateur des terroristes ».
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L’Affaire du Drone : Il a rejeté la thèse algérienne de la violation de l’espace aérien, la qualifiant de « motif fallacieux » et « défiant les lois de la physique », étant donné que les débris du drone abattu ont été retrouvés sur le territoire malien.
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Le Refus de Compétence : Le Mali a souligné la « profonde stupéfaction » suscitée par les commentaires d’officiels algériens niant l’enregistrement de la plainte à la CIJ, un comportement qu’il a ironiquement salué comme un « performant autobeur ». Plus grave, la « fuite en avant » de la junte algérienne, qui a refusé de donner son consentement à la compétence de la CIJ dans cette affaire, craignant ainsi d’être « démasqué publiquement comme agresseur et soutien du terrorisme international ».
En guise d’avertissement solennel, le Premier Ministre a menacé : « Pour chaque balle tirée contre nous, nous réagirons par réciprocité. Pour chaque mot employé de travers, nous réagirons par réciprocité. » Il a terminé ce chapitre en lançant un appel direct à la junte algérienne pour qu’elle cesse de soutenir le terrorisme international et s’implique dans la promotion de la paix en respectant la souveraineté des États.
La Réforme de l’ONU et le Retrait de la CPI : La Voie de la Souveraineté Juridique

Abdoulaye Maïga a profité de la célébration du 80e anniversaire des Nations Unies pour plaider en faveur d’une réforme urgente et indispensable de l’organisation. Constatant que le cadre multilatéral est mis « à rude épreuve » par la polarisation et le retour du protectionnisme, il a appelé à une ONU « véritablement rénovée, réformée et adaptée aux exigences de notre temps ».
En matière de justice, la Confédération AES a réaffirmé son opposition à l’instrumentalisation de la question des droits humains à des fins politiques ou de déstabilisation. En conséquence, les chefs d’État de l’AES ont pris la décision « avec effet immédiat » de se retirer du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) le 22 septembre 2025. Cette initiative vise à privilégier désormais des mécanismes endogènes de justice en adéquation avec les valeurs sociétales des peuples confédérés.
Enfin, le Premier Ministre a rappelé la revendication africaine, vieille de vingt ans, de réparation de « l’injustice historique » concernant sa représentativité au Conseil de sécurité. Il a réaffirmé le soutien total de l’AES à la position commune africaine, demandant l’octroi de deux sièges permanents et cinq sièges non permanents pour le continent.
Le Développement Endogène, Alternative au Système de la Dépendance
Au-delà des questions sécuritaires et diplomatiques, l’AES a présenté sa stratégie globale et intégrée de développement, fondée sur « l’audace et la souveraineté ». La vision est celle d’un développement endogène, marquant la « volonté ferme et inébranlable de prendre en main notre destin ».
Pour concrétiser cette ambition, l’AES a mis en place des politiques d’investissement stratégique dans des domaines clés tels que l’énergie, les infrastructures, l’industrialisation et la diversification économique. La création de la Banque Confédérale pour l’Investissement et le Développement illustre cette nouvelle dynamique. Forte de 75 millions d’habitants (majoritairement jeunes), d’un territoire immense et de ressources minières « parmi les plus importantes au monde », l’AES cherche à briser le « cycle vicieux de la dépendance et du surendettement » en s’orientant vers des mécanismes innovants comme les BRICS et les initiatives africaines de financement.
Le discours d’Abdoulaye Maïga est un acte de guerre diplomatique et un manifeste pour la souveraineté. Il s’est terminé par un avertissement poignant : « La Confédération AES n’a pas peur. Elle ne cédera pas. Elle résistera encore et toujours. » L’histoire, a-t-il conclu, jugera ceux qui ont armé les forces du mal et ceux qui ont oublié que la justice est la seule voie vers une paix durable. L’ONU a été mise au pied du mur : se placer du côté de la vérité ou devenir « le bras passif de l’injustice mondiale ».